La Baie d'Along, Vietnam

Tonkin, nord Viet-Nam. Le vapeur Emeraude glisse élégamment au cœur de l'illustre baie d'Along, offrant à ses passagers une croisière inoubliable. Rétro et raffinée, l'ambiance évoque celle du navire français homonyme qui sillonnait la baie au temps de l'Indochine coloniale. L'Emeraude d'aujourd'hui, une réplique fidèle, accueille des croisiéristes très actuels pour un voyage dans le temps et sous le charme de l'intemporelle baie d'Along.

Moins luxueuses mais aussi séduisantes, des jonques, dépourvues de voiles pour la plupart, proposent également aux touristes une visite de la baie. À bord, on s'émerveille devant les centaines de pitons vertigineux, dont certains culminent à 200 mètres au-dessus des flots verts. Leurs formes chimériques et les grottes secrètes qu'ils dissimulent ont inspiré d'extravagantes légendes et leur ont valu le classement, par l'UNESCO, au patrimoine mondial de l'humanité. Impossible de construire sur ces rocs escarpés. Dans la baie d'Along, on habite sur l'eau. Dans les villages flottants où s'agglutine une poignée de baraques, la population vit de pêche et de tourisme. Les maisons flottantes sont entourées de viviers où l'on conserve les prises. Pour ces petites communautés de pêcheurs, ancrées çà et là dans la baie, la mer sert de garde-manger, de jardin, de sanitaires et de poubelle...

Leur existence, viscéralement liée à la baie d'Along, est aujourd'hui menacée par la pollution de l'eau. Au fond de la baie, dans la zone industrielle d'Along, l'exploitation du charbon est en plein renouveau, dopée par la forte croissance économique du voisin chinois. Des centaines de millions de tonnes de terre et d'eau polluées, résidus de l'exploitation du charbon, ont déjà été rejetées dans la baie.

Malgré ces dégradations, il suffit d'un lever du jour brumeux derrière les reliefs énigmatiques jaillis des flots pour que l'enchanteresse baie d'Along retrouve toute sa féerie. Alors les pains de sucre qui, de loin, semblent se dresser en un rempart infranchissable, s'écartent imperceptiblement pour céder le passage.

Texte : Anne Jankeliowitch